Francesco Permunian – La maison du soulagement mental

Francesco Permunian – La maison du soulagement mental
[Traduit de l’italien par Lise Chapuis - L’arbre vengeur, 2015]

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Article écrit pour Le Matricule des anges

Fable caustique à l’humour exacerbé tendant par moments au grotesque, La maison du soulagement mental fait d’un drôle d’asile d’aliéné le prétexte à l’exposition théâtrale d’un monde dérangé où l’incarnation la plus sèche du mal pourrait bien être tapie en quelque repli. Le narrateur est un bibliothécaire dont la tante – folle mystique ayant de grande conversation avec la vierge – est accueillie en pension dans l’inquiétante maison. Partant, le roman exposera les portraits hauts en couleurs d’une galerie de personnages tous plus détraqués les uns que les autres, à commencer par les membres de la puissante et noble famille Manotazo qui règne sur le village, entre amateurs de poupées gonflables qu’on emmène en virée dans les festivals littéraire, « gentilhomme campagnard » à tendance vicelarde et bigotes curieusement libérales. On ne saurait encore faire l’impasse sur le voisin meurtrier qui cherche à prendre des cours de congélation, le psychiatre au passé trouble, le serial sodomiseur, etc. Derrière l’apparent catalogue exubérant, c’est un roman profondément désenchanté que nous donne à lire Francesco Permunian, placé entre autre sous l’égide de Cioran et celle de l’érudit italien Guido Ceronetti, véritable obsession pour l’un des personnages. Passé l’humour (noir) du début, le vers se glisse peu à peu dans le fruit jusqu’à le faire dangereusement grincer. Derrière les murs pour tout dire flexibles de la maison de fou – il semble au final que les fous soient aussi nombreux d’un côté comme de l’autre – rampe d’abord subrepticement puis de plus en plus clairement le fantôme effrayant de l’histoire dans ce qu’elle a de plus terrible, nazisme et déportation. Dans les caves d’un immeuble qui pourraient bien être celles de notre civilisation, un général d’opérette entretient une curieuse armée des ombres. C’est alors que le lecteur cesse définitivement de rire.


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